Maxence Rifflet

travaux BIO

NOS PRISONS

Un mouvement perpétuel, 2019. Maison centrale de Condé- sur-Sarthe, mardi 31 mai 2016
8 tirages optiques d’après négatif noir et blanc contrecollés sur contreplaqué peint
140 x 181 x 5 cm

Photographier en prison
Entre avril 2016 et novembre 2018, j’ai photographié dans sept prisons en collaboration avec des prisonniers. Comment photographier dans un espace de surveillance sans le redoubler ? Comment cadrer sans enfermer ? Pour répondre à ces questions, il a fallu s’écarter de l’intention d’illustrer l’enfermement, de représenter la prison en général, pour décrire des lieux spécifiques, avec des histoires et des fonctionnements singuliers : photographier des prisons, plutôt que la prison. Ce faisant, le travail révèle des architectures dont la diversité interroge la nature de la peine qui est infligée au prisonnier. Car si les lieux où il est condamné à vivre un temps sont si variés, peut-on se contenter de définir une peine de prison par sa durée ?

Une architecture carcérale est une machine optique au service de la surveillance. Ce que voit le surveillant, ce que ne voit pas le prisonnier depuis sa cellule ou le passant depuis la rue, tout cela est prévu par l’architecte. Faire des images en prison revient à participer à un jeu de regards contraint et inégal. En m’intéressant à l’architecture, j’ai mis cette difficulté au centre de mon travail photographique.

Dans chaque prison, j’ai organisé des ateliers avec des prisonniers, eux qui se confrontent quotidiennement à ces architectures. Nous avons fait des photographies ensemble et j’en ai fait seul, nous avons discuté. J’ai proposé des pratiques mais je me suis aussi volontiers laissé faire : certains m’ont utilisé pour mettre en scène une expérience, figurer un imaginaire, illustrer un message. Cette activité commune est au centre de ma démarche documentaire. La photographie y est autant un outil d’enregistrement que le moyen et l’enjeu d’une interaction. D’où l’importance des récits qui accompagnent les photographies : les textes racontent le processus de réalisation des images et les échanges qu’elles ont parfois provoqués. Ainsi, l’hétérogénéité des formes provient d’une attention aux situations et aux rencontres.

Finalement, l’architecture des prisons constitue à la fois le sujet du travail et l’espace dans lequel il se fait. Les corps sont la mesure de ces espaces, ils les activent, les révèlent et tentent parfois d’y résister.

Maxence Rifflet, avril 2018

Le moment des murs (dé-lire la salle de culte de la maison centrale de Condé-sur-Sarthe), 2018.
Tirage optique sur papier argentique noir et blanc d’après 6 négatifs et divers documents imprimés sur rhodoïde
100 x 106 x 7 cm

Une machine optique, 2019. Le « bâtiment A » du centre de détention de Caen, construit en 1842 par Harou-Romain, juillet 2016
2 tirages optiques sur papier chromogène d’après négatif (format 70 x 86 cm), contrecollés sur aluminium lui-même collé sur une structure en bois et béton
81 x 166 x 16 cm chaque objet

Tu peux me photographier et tu peux photographier ma cellule, mais je ne veux pas être photographié dans ma cellule, 2019. Maison centrale de Condé-sur-Sarthe, avril 2016
Tirage optique sur papier argentique d’après un montage numérique de trois négatifs et imprimé sur typon. Collage sur aluminium lui-même collé sur un support en contreplaqué peint
95 x 118 x 5 cm

En appui, 2019.Quartier des femmes de la maison d’arrêt de Rouen, septembre 2017
4 tirages optiques sur papier argentique noir et blanc contrecollés sur aluminium
80 x 100 cm chaque